lundi 11 mai 2009

La Mesure de toutes les choses

Connaissiez-vous cette église au fond
du Square Saint Peter à Rome (voir ici pour
comprendre l'ironie de la question) ?

En relisant un chapitre du « Voyage à Rome » de Pierre Grimal (je relis constamment ce livre, qui m'enchante), je tombe sur ces phrases qui me font aimer à nouveau (« raimer » devrais-je dire) la philosophie grecque (le reste du livre me fait aimer tout ce qu'il y a à Rome, même ce que j'y déteste et, par exemple, les colonnes torses du Bernin à Saint-Pierre de Rome parce qu'elles ont été faites des tuiles et des sculptures de bronze du Panthéon d'Agrippa sous l'instigation barbare* du pape Barberini -barbare lui-même comme l'indique son nom) :


Protagoras, le sophiste que Platon ne pouvait s'empêcher d'admirer, avait mis en tête de son principal ouvrage une formule qui devait avoir une grande fortune. Il avait écrit que «l'homme est la mesure de toutes les choses, de celles qui existent, du fait qu'elles existent, de celles qui n'existent pas, du fait qu'elles n'existent pas» Ce qui impliquait, pour la connaissance, un relativisme total, toute réalité résidant seulement dans la sensation, son impression sur la conscience humaine (...) Si bien que la vérité est créée par l'homme, et lui seul.

(page 649, Robert Laffont, coll. «Bouquins»)

Cela reprend, comme vous le voyez, la première maxime de Paul Valéry sur le fronton du Palais de Chaillot dont je vous ai parlé ici et qui fait parler le Palais:

Il dépend de celui qui passe
Que je sois tombe ou trésor
Que je parle ou me taise

Le sujet humain n'humanise pas ce qui n'est pas humain mais il lui donne sa voix pour parler et c'est la condition pour que ce qui n'est pas humain puisse parler selon ce qu'il est.
Si le sujet humain ne lui donne pas sa voix, rien de ce qui n'est pas humain ne peut parler, ni signifier, ni même exister (et un éventuel « Dieu » ne fait pas exception à la règle).
Les colonnes torses du baldaquin
de
Saint-Pierre de Rome, fruits de l'art du Bernin
et de la barbarie du pape Urbain VIII,

également persécuteur de Galilée.

* Quod non fecerunt Barbari fecerunt Barberini : « Ce que les Barbares n'ont pas fait, les Barberini l'ont fait ».

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