mardi 15 avril 2008

Texte littéraire et corps humain


Un texte littéraire fonctionne sur le même principe qu'un corps humain ou que le corps des animaux: il tire son énergie, c'est-à-dire ce qui lui permet de se produire et de s'accroître, d'un battement équivalent à celui du cœur pour les humains et les animaux.

Ce battement est plus évident dans un poème: c'est celui qui est causé par le retour à intervalles réguliers de sons similaires, ce sont les rimes, les sons qui reviennent à la fin de ces lignes qui composent les poèmes, lignes qu'on appelle des vers.
Regardez bien les vers ci-dessous (ils sont de Jean Racine (à droite) et sont tirés de sa pièce «Bérénice» qui est chère à mon coeur, vous saurez un jour pourquoi), je mets en gras et en majuscules les sons similaires qui reviennent, qui «battent» en quelque sorte, comme un cœur:

Dans un mois, dans un an, comment souffrirons-nOUS,
Seigneur, que tant de mers me séparent de vOUS?
Que le jour recommence et que le jour fiNISSE
Sans que jamais Titus puisse voir BéréNICE,
Sans que de tout le jour je puisse voir Titus?

S'il n'y avait que ces battements-là le texte ne vivrait pas très fort, il y en a d'autres, par exemple des battements causés par d'autres éléments que le retour de sons similaires. Il y a notamment le retour de constructions syntaxiques similaires comme ici dans les vers de
Racine la répétition de DANS UN (mois), DANS UN (an) et la répétition de (Q)UE LE JOUR (recommence), QUE LE JOUR (finisse) et les répétitions en gras dans ces deux vers:

SANS QUE (jamais) TITUS PUISSE VOIR (Bérénice)
SANS QUE (de tout le jour je) PUISSE VOIR TITUS.

Pour vivre un texte littéraire s'appuie sur des retours de ce genre, pas seulement des retours de sons ou de constructions syntaxiques mais aussi sur des retours d'images, des retours d'idées, des retours d'objets, des retours de personnages, ce qu'on appelle en musique des leitmotivs (ou des leitmotive, le pluriel en allemand) et des thèmes.
Nous approfondirons ces idées ultérieurement si vous me le permettez en l'appliquant à des poèmes complets et à des œuvres plus vastes, des romans que naturellement nous ne citerons pas en entier.

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